Le cochon kune kune, approche permacole

Johnnie et Bigoudi m’ont rejoint sur le terrain de la pépinière et j’aimerais vous les présenter car plus je les côtoie, plus je me dis qu’ils peuvent être de précieux auxiliaires, en plus de bons compagnons.

Passons en revue comment ils peuvent donner un coup de main aux permaculteurs !

Les caractéristiques de la race

Le cochon kune kune (prononcez « couni-couni ») est une race de cochon d’origine néo-zélandaise. Sa robe peut être de différentes couleurs :

  • unie : noir, crème, roux (« ginger« ), marron, noir avec des reflets dorés (« gold tip« )
  • bicolore : noir et blanc, roux et noir
  • tricolore

Il a la particularité d’avoir des pampilles (« piri piri » en Maori, « wattles » en anglais)

C’est un cochon de petite taille (mais pas nain), il pèse tout de même de 50 à 100 kg environ à l’âge adulte (voire plus pour certains mâles, je crois qu’en ce moment Bigoudi, mon verrat, explose les compteurs !).

Il a la réputation d’être très proche de l’homme (je confirme, on peut même dire que c’est un pot de colle parfois !) et docile. Comme tous les cochons, c’est un animal très intelligent, il peut apprendre de petits tours et comprend vite (garder en tête que comme les chiens, il s’éduque bien mieux à la récompense qu’à la punition).

Les besoins du cochon kune kune

En permaculture, nous nous attachons avant tout à répondre aux besoins de nos animaux.

Nourriture

Cette race a la particularité d’être herbivore. Cela signifie que les cochons kune kune ont des besoins en protéines plus faibles que les autres races de cochons, mais des besoins en fibre plus importants.

Désherbage de la butte en cours...

Désherbage de la butte en cours…

Vous pouvez visualiser une liste non exhaustive des plantes toxiques pour les cochons ici. On peut y remarquer que

  • des plantes toxiques pour les hommes le sont aussi parfois pour les cochons (if, petite et grande ciguë, arum, ricin, limbe de rhubarbe, etc).
  • les plantes contenant de l’acide oxalique sont à proscrire : oseille, chénopode blanc, oseille, collet et feuilles de betterave, sarrasin, amarante, etc.
  • parmi les plantes cultivées, il faudra veiller à ne pas les mettre trop en contact avec l’oseille, la carotte, le raifort, la betterave, les haricots, la rhubarbe, les pommes de terre. Les miens ont déjà eu l’occasion de rencontrer des haricots, des pommes de terre et de la rhubarbe et y sont complètement indifférents. En revanche Johnnie a essayé de goûter aux jeunes pousses d’oseille.

Au jardin j’ai remarqué qu’il affectionnent :

  • les coquelicots (leurs préférés)
  • la verge d’or (Solidago canadensis)
  • un peu d’armoise quand elle est jeune
  • le liseron (quelle bonne nouvelle !). La preuve en images :

Ils apprécient par contre certaines plantes cultivées :

  • Patate douce (pas étonnant, c’est une Convolvulaceae, la même famille que le liseron).
  • Les fraises
  • Les jeunes courges et courgettes (les fruits, mais laissent le pied tranquille)
  • Les petits fruits en général (mais ils ne sont pas souples du tout et ont du mal à lever la tête assez haut, ce qui limite leurs dégâts sur les arbustes, ils se contentent de manger les fruits tombés à terre).

Un petit exemple de dégustation de sureau par les bébés de ce été :

Evidemment, cela ne veut pas dire que les vôtres ne s’y intéresseront pas…

Ils apprécient aussi beaucoup :

  • les gastéropodes (escargots, même gros, et mangent aussi la coquille, limaces)
  • les vers blancs (hannetons) et autres larves, vers de terre.

D’une façon générale, le pâturage est la meilleure source de nourriture de nourriture pour les cochons kune kune. Vous pouvez compléter avec les restes de cuisine (légumes, fruits, éventuellement un peu de produits laitiers, mais évitez la viande). Si vous manquez d’espace ou si l’herbe devient rare, vous pouvez leur donner des céréales.

De mon côté je leur donne en complément un peu d’orge et de l’aliment pour chèvres et moutons (moins riches en protéines que les aliments pour cochons « normaux »). Je leur donne aussi du pain récupéré parfois chez un restaurateur.

Ils apprécient aussi la luzerne (fraîche, coupée, en granulés ou sous forme de foin). Si une brasserie locale est dans le coin, essayez de récupérer les drêches de brassage, très nourrissantes.

La meilleure façon de bien les alimenter est de les changer le plus souvent possible de pâture pour un accès régulier à de l’herbe fraîche.

Eau

Abreuvoir automatique relié à une cuve IBC, alimentée par la toiture de l’abri

A ne pas négliger ! Les abreuvoirs automatiques sont pratiques car les bassines d’eau se font souvent retourner… J’ai opté pour un abreuvoir relié à une tonne à eau (IBC), me permettant d’être assurée qu’ils ont de l’eau tant qu’il y en a dans le réservoir.

Le cochon a besoin d’eau à volonté, le manque d’eau peut mener très rapidement à une intoxication au sel. Plus d’informations sur l’excellent site Groin Groin.

Reste à trouver une solution pour que l’eau ne gèle pas en hiver.

Abri

Ce cochon est très rustique. Il n’a besoin que d’un abri sommaire (éviter la tôle et privilégier le bois, la pierre ou la terre). Par contre, gardez en tête que tout abri servira à des séances « grattage », et qu’ils ont intérêt à être assez solides pour résister au déhanché énergique de vos protégés.

Le cochon est, contrairement à son image populaire, un animal très propre et fait ses besoins au même endroit, toujours en-dehors de son abri. La paille reste propre et n’a pas besoin d’être changée très souvent.

En cas de très forte chaleur, vous pouvez leur prévoir un espace « boue », ils apprécieront.

Clôture

Un élément à ne pas sous-estimer !

Le cochon kune kune témoigne d’une force impressionnante malgré sa petite taille. J’ai d’abord opté pour un filet électrique (pour pouvoir garder des poules en même temps) mais l’enherbement est difficile à gérer : dès qu’un brin d’herbe touche le filet, la puissance diminue, il faudrait faucher autour de la clôture en permanence pour ne pas perdre de puissance. Peut-être que mon électrificateur manque de puissance ?

Nous avons finalement construit un autre parc avec du grillage à mouton et quelques morceaux de grillage à poule. La solution la plus facile semble être du grillage à moutons fixé au sol avec des agrafes car ils soulèvent le grillage très facilement avec leur groin.

Sinon, une clôture électrique constituée de rubans à plusieurs hauteurs est le plus efficace (mais on ne pourra pas mettre d’autre espèce, notamment de volaille, avec eux).

Soins

Il est souvent nécessaire de les vermifuger. Cela peut être sous la forme d’un médicament ou de plantes (mais il est vraiment difficile d’obtenir un spectre large avec les plantes, je suis en train de creuser le sujet).
Parmi les plantes ayant des vertus anti-parasitaires on peut citer

  • l’armoise
  • l’ail

Gardez bien en tête que plus vos cochons seront élevés de façon extensive et bien gérée (notamment avec des parcs tournants pour qu’ils aient toujours une herbe fraîche à disposition), moins vous aurez de problèmes sanitaires à gérer.

Les cochons peuvent attraper la gale, maladie transmissible à l’homme (pas grave mais très contagieuse).

Quand les miens sont arrivés ils en étaient porteurs, le vétérinaire leur a administré un vermifuge (Ivomec) mais j’aimerais trouver d’autres solutions à terme.

Il faut aussi penser à surveiller la maladie d’Aujeszky, transmise par les sangliers et donc susceptible de toucher les cochons élevés en plein air.

Compagnie

Le cochon est un animal grégaire et n’est pas fait pour vivre seul. Il faudra en prendre donc au moins deux. Une bonne option est de prendre 2 mâles castrés si vous ne souhaitez pas faire de reproduction, ils seront plus faciles à gérer.

Le comportement du cochon kune kune

Un cochon qui retourne le sol ?

Vous lirez souvent que le cochon kune kune ne retourne pas le sol.

C’est parfois vrai, mais dépend à la fois du contexte et de l’individu.  Le kune-kune reste un cochon, et le cochon aime partir à la recherche des racines et vers !

Physiologiquement, le groin très court du cochon kune kune l’encourage à brouter plutôt qu’à creuser le sol, et quand il creuse, c’est peu profond pour la même raison.

Mon terrain a très peu d’herbe pour le moment et ils creusent clairement le sol. J’en profite pour leur faire préparer le terrain avant d’y semer de la prairie.

Je les ai vus creuser dans ces situations :

  • il n’y a plus d’herbe à disposition
  • dans les cultures paillées, pour chercher notamment les vers blancs.
  • après de fortes pluies, lorsque la terre est très meuble, ils en profitent pour manger les racines, notamment de liseron

Il faut surtout prendre en compte que tout animal de ce poids piétine le sol : pour moi, c’est ce qui provoque le plus de dégâts sur le sol.

Je vous conseille de garder un enclos « sacrifié » en terme de sol (qui sera très piétiné) où vous garderez vos cochons après les fortes pluies : c’est à ce moment que les dommages sur le sol sont les plus malheureux.

Les produits du cochon kune kune

Entretien des terrains/préparation des zones de culture

Cette race de cochon peut servir à l’entretien des terrains :

  • Pour tondre certaines parcelles. Cela peut être particulièrement utile dans des parcelles arborées ou avec des arbres fruitiers. Une fois que la plante est bien installée et ligneuse, les cochons peuvent contribuer à tondre les inter-rangs. Contrairement aux moutons, ils ne mangent pas de parties ligneuses et n’abîment pas les arbres (prévoir qu’ils peuvent s’y gratter).
  • Si l’on souhaite qu’ils retournent un peu le terrain, on peut les laisser dans des parcelles où il ne reste plus d’herbe et leur éparpiller du grain pour les inciter à gratter. A savoir : ils ne creuseront pas profondément (leur nez court les en empêche), et cette pratique peut leur donner l’habitude de creuser, chose que vous voudrez peut-être éviter.

Viande

Pour les carnivores, le cochon kune kune peut bien sûr être consommé, sa viande est réputée, elle est plus grasse et persillée que celle des cochons modernes.

Plaisir et divertissement

C’est un vrai plaisir de les avoir avec moi, ils sont très proches de l’homme, et faciles à gérer (on les fait aller où on veut avec une poignée d’orge !).

Avoir une portée, le bonheur !

C’est une véritable attraction pour les passants, certains leur amènent du pain et les enfant adorent venir les caresser.

Ils sont calmes (sauf quand Bigoudi, mon mâle, me voit arriver et fait un caprice pour avoir du grain !) et ne créent pas de mauvaises odeurs.

Un bon gardien ?

Je vais bientôt essayer de leur faire garder quelques poules contre les renards et les fouines, à voir…

Obligations légales

En France, tout détenteur de cochons doit être déclaré à la Directions Départementale de la Protection des Populations (DDPP).

Un numéro d’élevage (EDE) vous sera attribué, et vous devrez les boucler pour les identifier avec votre numéro d’élevage.

Ces obligations sont valables même pour les éleveurs amateurs, et si ce sont des animaux « d’agrément », non destinés à la consommation.

Un contrôle annuel est également obligatoire pour la maladie d’Aujesky (et pour le SRDP, en fonction des départements).